mercredi 30 décembre 2009

Cahier d'Emmaus n°3



… 2010 nous bouscule déjà !

Vous n’êtes pas sans avoir remarqué que certains groupes « se vident »… et cela nous questionne tous. Voici quelques chiffres parlants :
- En cours du jour, sur 264 entrées en formation, 63 dossiers ont été retirés (dont 34 primo arrivants, et en majorité, Soudanais, Bangladeshi, et quelques Afghans).
- En cours du soir, sur 133 entrées en formation, 45 dossiers ont été retirés (essentiellement là aussi des primo arrivants, Soudanais, Bangladeshi).

Il est donc intéressant de noter qu’il s’agit d’un public adressé par notre réseau, un public « de l’urgence » avec des besoins que notre offre habituelle, extensive ne satisfait peut-être pas… ? Votre avis nous intéresse :nous vous proposons de continuer dès maintenant un groupe de réflexion afin d’envisager ensemble, un (ou des) mode(s) de fonctionnement qui tienne(nt) compte des évolutions des besoins des publics accueillis. Nous en arrêterons les modalités très prochainement.

Rose-Marie Ryan
directrice AFB

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Bonsoir,

NB: Les majuscules au sein des mots sont des gutturaux sur lesquels ils faut appuyer. C'est pour faire la différence entre les sons que je n'ai pas mis de majuscules en début de chaque ligne.
Comme il n'y a pas de majuscules et minuscules en Tigrinya cela ne pose pas de problème à la personne qui le lit. Mais chaque ligne correspond à celle du texte français.
Bonne lecture

Amicalement

Ghenette


L’ETRANGER : eti gasha ( ou bien eti ouedi ouetsaii)
mystiraoui Gasha ! Nimen estce que ti fetou ? N’boRa do n’déRa,
n’HafteRa do n’HaouRa ? .
abo, Iébiléï, adé (iébiléï), Hafti ièbiléï, Haoui (iébiléï)
ni èEroukteKa Ke ?
eza kal ezia, tourgouma kisab Hiji aifeltan ïé
haguerka Ke ?
tiHiti aiénéti ourHi kem etirikeb Keman Ifeleten
embaar’kes kunjina ?
n’aï egzher misli Hiza nizelalem itneber entetiKeoun mefeteKoua
ouerki’Re de’a ?
likE kemti niseKatekoum n’egzher ittslouo an n’ourki ïézeïfetou
intaï daa Ika tifetou, ni kali seb zeitemesel gasha ?
« ane zifetouo debena … iti menguedou Hizou zeHalef debena…niou maedo Koinou ziHalef … iti debena masdeneK ziKone debena! »

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Original Message -----
From: Olivier Marboeuf
To: patrick fontana
Sent: Tuesday, December 29, 2009 5:58 PM

Subject: restitution Intégrations

Patrick,

J'espère que tu as passé de bonnes fêtes.
Je sais que c'est un peu la charrue avant les boeufs mais je suis en train de caler des dates de restitution publique des différents projets que nous accompagnons.
Nous montons une série de rencontres (en collaboration notamment avec les Métallos, là pour de vrai !), un peu des mini-colloques autour d'une réflexion sur des actions artistiques dans des cadres socio-éducatifs-sanitaires...
A la date du mardi 25 Mai, nous prévoyons une rencontre "Travailler la langue, inventer la parole". Penses-tu être à même de présenter un rendu de ton travail d'atelier ce soir-là ou est-ce trop court ? Ce serait vraiment super mais cela dépend aussi de tes avancées.
Je ne sais pas sous quelle forme tu imaginais la chose finalement, peut-être plutôt une installation. On peut imaginer quelque chose aussi dans la première pièce de Khiasma. Je ne sais pas, à toi de me dire. Si on ne peut pas à cette date, alors cela repousse à la fin juin car entre on a une exposition.

dis-moi tes impressions.

meilleurs voeux

Olivier

Dans le mot "immigration" passe comme un souffle vivifiant. Le migrant le plus dépouillé de tout peut mettre en contact des différences, qui sont la nourriture la plus vivace des identités. L'intégration", au contraire, est une verticale orgueilleuse qui réclame hautainement la désintégration préalable de ce qui vient vers nous, et donc l'appauvrissement de soi. Tout comme "tolérer les différences" qui se dresse sur ses ergots pour évaluer l'entour et qui ne se défait pas de sa prétention altière. De même le "codéveloppement" ne saurait-il être un prétexte destiné à apaiser d'éventuels comparses économiques afin de pouvoir expulser à objectifs préchiffrés, humilier chez soi en toute quiétude. Le codéveloppement ne vaut que par cette vérité simple : nous sommes sur la même yole. C'est la barque ouverte. Personne ne saurait se sauver seul. Aucune société, aucune économie.

Aucune langue n'est, sans le concert des autres. Aucune culture, aucune civilisation n'atteint à plénitude sans relation aux autres.
Edouard Glissant, Patrick Chamoiseau, Quand les murs tombent, l'identité nationale hors-la-loi ? (éd Galaade)

En France, l'étranger a été externalisé au crible d'une économie de la "disparition" par assimilation ou intégration.

"L'intégration" dégage une grammaire qui revendique une culture politique au coeur de l'identité nationale. La nationalité apparaît comme l'arcane de ce schéma d'incorporation. Pour être ouverte aux étrangers sédentarisés, il lui faut fonctionner comme un producteur culturel d'appartenances. La médiation nationalitaire n'est pas seulement le chemin par lequel l'étranger devient objectivement citoyen, mais la voie qu'il doit emprunter pour manifester son attachement, son identification aux valeurs partagées par la collectivité nationale.
Christophe Bertossi


Salut Olivier

Je te remercie de ta proposition. Ok pour le 25 mai pour une installation dans la première pièce. On a prévu de tourner début mai.

Le projet Intégration(s) se modifie de fait (Mathias-le danseur- ne peut pas continuer ce qui remet en question le geste en commun) et remet de fait l'utilisation de la vidéo.

Je cherche à mettre en rapport Baudelaire et les migrants à cette injonction politique de mettre l'apprentissage de la langue française au cœur du dispositif d’accueil pour les étrangers. (Loi dite Hortefeux)

Et pour les cahiers d'Emmaus? Sur votre blog me parait le mieux pour moi techniquement parlant.

Walter Benjamin me dévore ou c'est l'inverse....

Bonne fêtes et à bientôt.
Pat

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Chantiers ouverts :

Cette année, j’utilise le tableau ce que je ne faisais pas avant. Je m’aperçois qu’il est un outil très intéressant à plusieurs titres : le premier, le plus évident, c’est que lorsqu’une des personnes lit elle n’a pas la tête baissée sur sa feuille et laisse entrer l’air et fait sortir les sons ! Le deuxième, est la possibilité qui m’offre de mieux expliquer les mots, les découper visuellement en isolant chaque syllabe. Le troisième c’est que j’invite les personnes à venir écrire.
Je commence à bien connaître les difficultés de chacun.

Antoine est passé cet après-midi pour nous apprendre quelques rudiments du langage des signes. Nous travaillons la première phrase du poème de Baudelaire l’Etranger.
L’exercice est révélateur des difficultés de chacun. C’est la même chose pour l’apprentissage des syllabes en français. La précision du geste est importante, pour ne pas dire un mot à la place de l’autre. Je suis surpris par deux personnes en particulier, qui ont de vraies lacunes de lecture qui sont donc plus réservées d’habitude et qui montre une dextérité et une nouvelle énergie pour cet exercice.
Je propose que cette phrase soit l’exercice de base à faire ensemble pour la semaine prochaine.

Après le départ d’Antoine, je donne les traductions en Chinois, en Tamoul et en Turc.
Nous écoutons la lecture de l’Etranger dans ces langues.
Puis nous lisons en français, le poème. La traduction donne une nouvelle impulsion à la lecture. Le sens dans son entier se révèle pour au moins quatre personnes.

La disponibilité du groupe est de plus en plus grande, je vais faire entrer des exercices de chants proprement dits dès la semaine prochaine.

Je viens de trouver un traducteur pour le Vietnamien et je dois acheter une traduction en arabe. Toutes les traductions seront donc disponibles bientôt.